Un guide exhaustif sur l'eau en élevage bovins lait
Qualité, quantité, analyse, traitement, réseaux... le Cniel et ses partenaires viennent d'éditer un guide pratique sur la ressource en eau.
C'est un guide de 95 pages sur la ressource en eau sur la ferme bovins lait que Romain Salles, chargé de projet eau en élevage à l'Idele, a résumé le 7 octobre lors d'une conférence au Sommet de l'élevage. Une initiative que l'on doit au Cniel (interprofession laitière nationale) et à laquelle ont collaboré l'Institut de l'élevage (Idele), le GDS de la Mayenne et Seenovia. Un document qui pose tant les enjeux à l'heure du changement climatique combinant sécheresses et canicules, que l'état et l'origine de la ressource disponible en élevage sur les volets quantitatifs et qualitatifs, ou encore les besoins des animaux et les précautions à prendre pour leur abreuvement.
Une ressource et une charge
Quelques chiffres d'abord : un élevage moyen de 70 vaches laitières absorbe 3 500 m³ d'eau par an, consommé à 75 % par l'abreuvement du troupeau, 18 % par le nettoyage des installations de traite et 5 % par des fuites dont le ratio peut être bien supérieur... Une ressource essentielle dont la facture peut vite grimper quand elle dépend à 100 % du réseau public, pour atteindre les 15 000 € là où le m3 se tarifie à 5 € (2,5 € en moyenne en France). Charge économique mais charge de travail aussi (1 à 2 heures par jour) en période estivale quand il faut déplacer la tonne à eau entre les parcellaires.
Réseau, forages, sources, toit : les plus et les moins
D'où vient cette eau : parfois du seul réseau d'eau potable, une dépendance qui peut devenir problématique et source de conflits en période de sécheresse. Le recours aux eaux souterraines, captées sous forme de forages est aussi fréquent, les forages profonds (plusieurs dizaines de mètres, mais de faible diamètre) présentant l'avantage, par rapport aux puits, d'une moindre vulnérabilité eaux variations de niveau et d'une meilleure qualité bactériologique de l'eau issue de sa filtration dans le sol. Les eaux de sources en zone de socle granitique sont celles les plus sujettes à la contamination bactériologique. D'autres systèmes existent, plus anecdotiques : les puisards (ou puits captants) aménagés sur les berges de cours d'eau, d'un étang, d'une mare...t enfin, les eaux de toiture qui cumulent plusieurs points faibles : investissement et coût de fonctionnement élevés, faible disponibilité, mauvaise qualité... Le tableau ci-joint résume les avantages et inconvénients des différentes ressources en eau.
Gare à la bactério
Hormis pour l'eau du réseau, potable, l'utilisation de l'eau captée pour l'abreuvement et les installations de traite(1), nécessite de vérifier sa qualité par des analyses bactériologiques (au moins annuelles dans le cadre de la charte des bonnes pratiques en élevage). Sont recherchés les escherichia coli et entérocoques, principaux traceurs de risques. Ces eaux doivent être soumises à un traitement physique (pour éliminer un maximum de molécules en suspension) suivi d'une désinfection (dioxyde de chlore ou UV...).
Abreuvoirs : des emplacements pas au hasard
En amont, la conception du réseau d'eau doit intégrer un système de nourrice et vannes, et prémunir du risque de gel (réseau enterré au minimum à 50 cm, canalisations extérieures isolées,...) de même que des interactions entre réseaux d'eau et électriques.
En bâtiment comme au pâturage, le positionnement, les capacités, la propreté et le nombre d'abreuvoirs (un abreuvoir collectif pour 20 vaches) sont essentiels pour éviter une hydratation insuffisante des vaches dont les effets peuvent rapidement être délétères tant pour la santé de l'animal que pour sa production. Des bacs trop peu nombreux ou éloignés risquent d'être accaparés par les dominantes du troupeau. L'équipement idéal doit prévoir une longueur importante (10 cm/vache), un volume conséquent (1 000 l), des abords stabilisés, un débit de 15 à 20 l/min sachant que les besoins d'une vache laitière peuvent varier de 30 à 140 l/j selon la température et l'hygrométrie extérieures et son stade de lactation.
P. Olivieri
L'eau utilisée pour le nettoyage et le rinçage doit être potable : avec 0 escherichia coli et 0 entérocoques à l'analyse.
Comment économiser ?
Des économies d'eau sont réalisables en anticipant les choses lors de la conception de l'installation de traite avec le choix de surfaces faciles à nettoyer, le mouillage préalable à la traite, des souillures repoussées manuellement avant le lavage final de même que par le recyclage de l'eau du dernier rinçage pour le nettoyage des quais. Les eaux de pluie peuvent aussi être utilisées pour le nettoyage de sols et murs, l'eau issue des pré-refroidisseurs peut également servir à l'abreuvement.
Superposez une carte géologique à la carte de France de la densité d'élevages bovins : vous obtiendrez une correspondance quasi parfaite entre les massifs granitiques (socle : Armorique, Massif central, Vosges...) et l'implantation préférentielle des élevages. Tout sauf surprenant, ces sols pauvres étant des moins propices aux cultures. Dans ces sols granitiques et volcaniques, l'eau est présente majoritairement sous forme de ressources superficielles, sensibles aux sécheresses.