Chrysomèle du maïs : il est temps d’agir !
Les dégâts économiques liés à la chrysomèle sont restés très limités en 2021 grâce à une météo estivale fortement arrosée particulièrement favorable à la culture du maïs. Pour éviter de s’exposer à un risque de nuisibilité important au cas où les conditions climatiques de l’été 2022 ne seraient pas aussi favorables qu’en 2021, il est grand temps de mettre en œuvre les recommandations techniques adaptées.

Depuis le début des années 2000, la chrysomèle du maïs est présentée comme une menace susceptible d’occasionner des dégâts sur le maïs en France. Si les risques étaient au début plutôt d’ordre réglementaire, les risques économiques sont désormais prévisibles en Rhône-Alpes et en Alsace, les deux régions les plus colonisées par l’insecte.
Quantifier l’abondance de l’insecte
Deux types de pièges sont utilisés pour la surveillance ou la gestion de la chrysomèle sur un territoire. Le premier est le piège englué muni d’une phéromone femelle qui attire les mâles dans un rayon de quelques dizaines de mètres. Ce piège sert à détecter la présence de l’insecte. La quasi-totalité des pièges disposés sur le territoire de Rhône-Alpes en 2021 ont capturé des chrysomèles. Cela veut dire que l’insecte est présent partout, de façon plus ou moins forte selon les endroits. À titre d’exemple, en 2021, sur les 59 pièges à phéromone suivis, près de la moitié ont capturé plus de 500 insectes sur l’été. Le deuxième type est le piège chromatique, sans phéromone et de couleur jaune. Il attire tous les insectes, chrysomèles mâles et femelles comprises. Ce type de piège permet de quantifier la population de chrysomèles dans un environnement donné. En mesurant l’abondance des adultes présents dans une parcelle, il permet aussi de décider de la stratégie à adopter l’année suivante en se basant sur les chiffres des captures. Ainsi, les agriculteurs italiens décident de changer de culture lorsque le piège jaune capture plus de dix insectes par piège et par jour durant tout l’été. Aux États-Unis, le seuil est de seulement cinq insectes par piège et par jour car les maïs sont rarement irrigués et sont donc soumis à une éventuelle sécheresse estivale.
L’expansion de la chrysomèle est prévisible
Si la colonisation de la région Rhône-Alpes par la chrysomèle n’est plus à démontrer, on peut s’intéresser à l’intensité de son développement selon différentes stratégies mises en œuvre. L’idée est de choisir la ou les stratégies qui permettront de vivre avec l’insecte tout en assurant un revenu optimal pour le maïsiculteur. Pour cela, Arvalis a modélisé le développement de l’insecte dans les parcelles en utilisant un modèle proposé par un chercheur hongrois dans différents territoires et ce suivant une quinzaine de scénarios, plus ou moins contraignants. Les quinze scénarios, de A à O, partent d’une infestation moyenne de cinquante insectes capturés pendant l’été, ce qui correspond à la situation actuelle. On regarde alors quel est le pourcentage de parcelles qui atteignent le seuil de nuisibilité de cinq adultes/piège/jour (seuil sécuritaire aux États-Unis) au cours des dix années à venir.
Quinze scénarios mis en œuvre
Dans les deux territoires étudiés (Grésivaudan et marais de Bourgoin-Jallieu en Isère), si on ne fait rien, 90 % des parcelles atteindront le seuil de nuisibilité au bout de trois ans et 100 % au bout de quatre ans. Si on ne change pas l’assolement mais que l’on applique uniquement un larvicide au semis, on décale simplement le problème de deux à trois ans, car le larvicide n’est efficace qu’à environ 30 %. Si on pratique une rotation un an sur six, c’est-à-dire qu’on implante une autre culture, on risque de subir le même effet que le larvicide seul. La rotation un an sur cinq est un peu plus efficace mais encore insuffisante dans ce contexte car dès la dixième année, 80 % des parcelles atteignent le seuil de nuisibilité. Les scénarios à privilégier sont ainsi la rotation un an sur quatre seule ou la rotation un an sur cinq avec un larvicide au semis lorsque les captures sont significatives l’année précédente. De plus, la réalisation d’une rotation dès que les niveaux de captures atteignent le seuil de deux insectes et demi par plaque et par jour permet de limiter le nombre de parcelles avec des dommages potentiels à moins de 10 % et à moins de 20 % si la rotation est envisagée quand les niveaux de captures atteignent cinq insectes par plaque et par jour.
Que faire en 2022 et par la suite ?
Pour la campagne 2022, il est recommandé de ne pas cultiver de maïs dans les parcelles où les captures sur pièges chromatiques dépassent cinq individus par pièges et par jour en 2021, soit environ 20 % des parcelles surveillées à l’aide de pièges chromatiques au cours de la dernière campagne. La rupture de la monoculture doit être mise en œuvre sans tarder dans ces parcelles. À l’inverse, 80 % des parcelles suivies avec des pièges chromatiques sur ces secteurs pourront encore être cultivées en maïs en 2022. En appliquant les mêmes règles de décision basées sur les niveaux de captures chaque année, il sera possible de préserver le même niveau de la sole maïs dans la région, tout en limitant les risques.
Thomas Joly, Arvalis-Institut du végétal
ChrysoPop : la chrysomèle sous haute surveillance
Pour faciliter la surveillance de la chrysomèle du maïs et partager les observations de piégeage acquises par les agriculteurs, Arvalis et l’Inrae proposent une application dédiée à ce ravageur, baptisée ChrysoPop.
L’application du ChrysoPop permet aux utilisateurs d’accéder à des informations concernant la biologie de la chrysomèle du maïs, la description des outils de surveillance du ravageur et des photos pour reconnaître les adultes. Afin d’être acteurs de la surveillance, les observateurs peuvent demander un kit de piégeage de la chrysomèle du maïs via l’application. En 2022, les pièges seront envoyés gratuitement aux observateurs (nombre de piège limité). Le type de piège (phéromone ou chromatique) sera déterminé en fonction du secteur géographique de l’observateur. Les pièges devront être mis en place en début de période de vol des adultes, soit à partir de début juillet. Ils seront ensuite suivis régulièrement pendant six semaines avec un relevé hebdomadaire. À chaque relevé, l’observateur renseignera les informations des captures dans l’application ChrysoPop. Chaque observateur contribuera ainsi à la surveillance du ravageur et pourra visualiser les captures obtenues par l’ensemble de la communauté dans une carte évolutive au fil de la saison. ChrysoPop est un outil de surveillance participative proposé aux agriculteurs et aux techniciens en tant qu’outil complémentaire au Bulletin de santé du végétal.
Pour télécharger Chrysopop, rendez-vous sur Play Store ou Apple Store. Vous pouvez commander des pièges (phéromones ou chromatiques, selon votre secteur) via l’application.