Earl les Pampilles : objectif 100 % autonomie fourragère et protéique
Jeudi 23 juin, l’EARL les Pampilles à Alixan, exploitation caprine fromagère, accueillera la journée portes ouvertes « Cap’Protéines ». Le point sur cette exploitation autonome au niveau fourrages et proche de l’autonomie en protéines.

Foin de luzerne, céréales autoconsommées, pâturage tournant, tout est mis en place à l’EARL les Pampilles pour assurer un lait et des fromages « 100 % made in Alixan ». Lionel Mossière et Florence Cureau ont repris cette ferme, proche de Romans-sur-Isère, avec le projet de pérenniser un atelier caprin avec transformation fromagère à dimension humaine et le plus autonome possible. Quinze ans après leur installation, le pari est en passe d’être réussi.
Miser avant tout sur la luzerne
L’exploitation dispose de sérieux atouts : un parcellaire plutôt groupé, 90 % labourable, une surface potentiellement irrigable de 36 ha. Mais encore faut-il savoir se donner les moyens d’exprimer ce potentiel. L’assolement est composé d’une douzaine d’hectares de luzerne, 3 à 4 ha de prairies multi-espèces proches du bâtiment, une vingtaine d’hectares de céréales (orge, blé et maïs grain). La première stratégie mise en place a été de développer les luzernes et surtout de miser sur la qualité. La fauche est très précoce, au stade bourgeonnement, en bénéficiant du vent du nord et du sud qui permet de sécher rapidement le foin au sol. Sans matériel très sophistiqué (faucheuse à disques avec conditionneur à rouleaux, andaineur double rotors), sans fanage, le travail se fait avec beaucoup de douceur et une surveillance accrue. Lionel Mossière arrive à récolter des luzernes feuillues à plus de 18 à 20 % de MAT. C’est l’aliment de base des chèvres en lactation, des taries et des chevrettes, soit environ 120 bêtes toute l’année.
Près de 900 litres par chèvre avec des céréales de la ferme
Avec des rendements corrects (60 q pour l’orge en sec, 110 q pour le maïs irrigué), l’éleveur complémente ses chèvres avec les céréales produites sur l’exploitation, soit 35 tonnes de céréales pour l’ensemble du troupeau. Le lait est au rendez-vous avec 850 à 950 litres en moyenne par chèvre. Les taux sont historiquement bas mais le rendement fromager reste bon. Un aliment riche en matière grasse et à 26 % de MAT a été acheté en 2020. L’impact attendu sur les taux est resté modeste. L’achat a été supprimé en 2021. Au final la consommation de concentré est de moins de 400 g/litre de lait. L’efficacité est bonne et c’est un concentré à 95 % issu de l’exploitation. Enfin les éleveurs ont investi récemment dans un robot d’alimentation (20 000 euros HT) qui passe huit fois par jour en alternance soit quatre fois pour repousser les fourrages et quatre fois pour distribuer les concentrés. Le gain sur la productivité des chèvres a été modeste mais c’est surtout un confort de travail très apprécié.
96 % d’autonomie en protéines en 2020
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : autonome en fourrage, vente du foin le moins adapté aux caprins, vente de céréales et achat de concentré réduit au minimum, voir nul comme en 2021. Les éleveurs ont trouvé leur équilibre technique et économique.
Répartition de la provenance de la MAT et bilan d’autonomie massique fourrages et concentrés
Aller au bout de la logique avec le pâturage
En 2021, les éleveurs franchissent encore un pas : celui du passage en bio et de la mise en place du pâturage. Pour Lionel et Florence, c’est la continuité de leur projet. La conduite du troupeau était proche du bio et avec très peu d’achats. Les rotations à base de luzerne et les fumiers permettent d’être quasiment autonome en engrais. Le pari le plus ambitieux est de faire pâturer les chèvres. Et là encore, les éleveurs ne font pas les choses à moitié : implantation de prairies multi-espèces sur le conseil du conseiller fourrage d’Adice, Patrick Pellegrin, création de chemins d’accès, découpage du parcellaire pour créer des parcs de deux à trois jours, accessibles à l’irrigation et à la faucheuse. Ainsi trois à quatre hectares ont été réaménagés. Les premières sorties en 2021 ont été sportives mais concluantes. Les éleveurs ont maintenu leur production de lait et ont plaisir à voir les chèvres pâturer au pied de la maison. Les clients, eux, sont ravis.
L’autonomie mais pas à quel prix ?
Lionel Mossière et Florence Cureau participent activement au groupe « coût de production ». Après quelques années plus difficiles, les résultats sont maintenant très satisfaisants. Tant en termes d’efficacité économique (44 % EBE/produit hors main-d’œuvre), de revenu, de capacité à continuer à investir et de temps de travail (embauche d’un salarié à temps partiel). Les charges courantes sont très basses, à moins de 800 euros/1 000 l et inférieures de 300 euros à la référence. Seule la hausse du carburant aura un impact significatif sur les charges. À ce jour, le passage en bio ne s’est pas accompagné d’une hausse du prix des fromages mais c’est un sérieux atout commercial tout comme d’être à 100 % autonome sur l’alimentation. Enfin la mesure de l’impact carbone de l’exploitation en 2020 est bonne en associant productivité animale, longévité du troupeau, faible consommation d’intrants. La mise en place du pâturage et les rotations plus longues devraient encore améliorer le bilan et notamment le stockage du carbone.
Jean-Philippe Goron, Adice
L’assolement est composé d’une douzaine d’hectares de luzerne, 3 à 4 ha de prairies multi-espèces et une vingtaine d’hectares de céréales. ©earllespampilles.com
Jeudi 23 juin : journée portes ouvertes Cap’Protéines
Le jeudi 23 juin matin, à l’EARL les Pampilles à Alixan, six ateliers seront proposés pour aborder et échanger autour des questions d’autonomie alimentaire, protéique et énergétique : production et récolte de foin luzerne, pâturage tournant petites parcelles, méteil grain, soja toasté, semences fermières (trieuse graines), production et autoconsommation d’énergie photovoltaïque, bilan carbone, haies et bien-être animal. En complément du témoignage de Lionel Mossière, gérant de l’EARL les pampilles, les ateliers seront animés par nos experts Adice et nos partenaires : Institut de l’Élevage, Cap Pradel, Mission haies et Diméo Energie. Rendez-vous à 9 h 30 à l’EARL des Pampilles.
Journée gratuite et ouverte à toutes et tous.
Contact : Jean-Philippe Goron, Adice, au 06 71 00 37 19 ou [email protected]
Earl les Pampilles, une ferme engagée dans le Réseau Cap’Protéines

Le projet national Cap’protéines, piloté par Terres Inovia et l’Institut de l’Élevage, vise deux objectifs : Accroître la production de protéines via les fourrages et valoriser en élevage les tourteaux et graines d’oléoprotéagineux d’origine France. Ce programme se décline en quatre actions majeures :
1 Innover dans la diversification des productions fourragères riches en protéines et investir dans la recherche de nouveaux modes de production animale à travers des plateformes d’essais et une série d’essais zootechniques.
2 Faire connaître des systèmes fourragers et animaux plus autonomes et résilients, avec 330 fermes pilotes bovins, caprins et ovins.
3 Développer des références et des outils : logiciels, plateformes numériques, applications éleveurs et conseillers.
4 Créer une dynamique collective pour adopter de nouvelles pratiques.
Les éleveurs et acteurs de la recherche appliquée et du conseil sont impliqués. Le centre élevage de Poisy, Arvalis à Pusignan ou la ferme expérimentale caprine du Pradel conduisent des essais zootechniques ou agronomiques. Les lycées agricoles du Valentin (26) ou du Pradel (07) mettent en place des plateformes de démonstration et des collections fourragères pour former les futurs éleveurs. Les structures « Conseil Élevage » sont mobilisées pour suivre des élevages innovants en recherche d’autonomie protéique. Ainsi cinq élevages caprins sont accompagnés par Adice*. Parmi les leviers mis en place, on retrouve : le pâturage tournant, les prairies multi-espèces, le foin de luzerne séchée au sol, le séchage en grange, le méteil grain, la culture de soja et les protéagineux graine.
*Conseil élevage Ardèche, Drôme et Isère.