La détection et prévention des boiteries

Les affections du pied représentent la majeure partie des troubles locomoteurs. En effet, dans près de 90 % des cas, l'origine d'une boiterie est podale. Pour les 10 % restant, la boiterie peut avoir une origine osseuse, articulaire, musculaire ou nerveuse avec des localisations très diverses. Environ 80 % des affections podales sont localisées au niveau des postérieurs car ce sont ceux qui sont soumis aux plus grandes contraintes, contre 20 % au niveau des antérieurs. Enfin, ce sont souvent les onglons externes qui sont touchés sur les postérieurs, toujours pour des raisons biomécaniques.
Les boiteries d'origine podale sont associées à cinq maladies principales : la fourbure ; le fourchet ; la maladie des Mortellaro ; le panaris et l'abcès de la sole. La dermatite digitée et le fourchet sont des maladies contagieuses dues à des bactéries. Le panaris apparaît suite à l'entrée de germes microbiens par une plaie de la peau interdigitale créée par un petit traumatisme. Le panaris peut prendre des allures de maladie contagieuse du fait des circonstances d'apparition qui peuvent concerner un lot d'animaux (zone et chemin boueux « traumatisant », par exemple). L'abcès de la sole apparaît suite à l'entrée de germes microbiens due à la perforation de la sole par un objet contondant. Seule la fourbure est une maladie non-infectieuse. Elle apparaît suite à des perturbations complexes de la vascularisation du pied et de la position de la 3e phalange et de la fabrication de la corne.
Les causes alimentaires
Les causes des boiteries sont multiples et leur origine peut être liée à l'alimentation, l'habitat, la conduite de l'élevage en particulier sanitaire et la génétique. L'alimentation (qualité, quantité et équilibre) est importante pour la santé des pieds car elle joue un rôle essentiel dans la qualité des onglons, notamment de la corne qui doit être de bonne qualité. L'ensemble des nutriments nécessaires à sa fabrication doivent donc être apportés en quantité suffisante. Elle joue également un rôle sur le coussinet plantaire qui doit être suffisamment épais pour assurer une bonne absorption des chocs lors de la marche. Or, en cas d'amaigrissement de la vache, le coussinet « fond » rapidement, d'où l'apparition de lésions. Il faut donc éviter tout déséquilibre dans la ration et tout amaigrissement des animaux.
Les facteurs de risques liés aux bâtiments
Les facteurs de risques liés aux bâtiments (conception, agencement...) sont primordiaux dans l'apparition ou l'aggravation de boiteries en élevages bovins. C'est pourquoi, lors de la phase de réflexion d'un projet bâtiment, il est important que la problématique « boiterie » soit directement incluse.
L'apparition des boiteries est liée, d'une part, à la qualité des sols, du lit, des zones de déplacement et, d'autre part, à l'hygiène générale (causes infectieuses). Le risque de boiteries et de lésions d'origine infectieuse en stabulation avec logettes est plus élevé par rapport aux aires paillées, notamment à cause de la dureté des sols. Ce risque serait encore plus marqué pour les systèmes en conduite lisier (logettes tapis ou matelas avec asséchant), en comparaison aux systèmes en conduite fumier (logettes paillées). Ceci peut être lié au fait que l'humidité du bâtiment et des sols est certainement plus importante dans les systèmes lisier (absence de paille qui assèche les sols). Dans les stabulations libres, les vaches restent en position de repos (couchées) de 10 à 14 heures par jour, réparties en 10 à 15 périodes journalières. Le lieu de couchage doit donc être confortable, moelleux, propre et sec. Les logettes doivent être adaptées au troupeau et réglées en fonction du gabarit des animaux. Plusieurs éléments doivent être pris en compte : la largeur et la longueur de la logette (les plus grands animaux ne doivent pas avoir l'arrière-train dans le couloir, mais les petits gabarits doivent pouvoir bouser dans les couloirs) ; l'espace devant la logette pour ne pas entraver les mouvements de lever (absence de murs, d'obstacles) ; la présence d'un arrêtoir pour éviter que l'animal ne s'avance trop (type, position...) ; le réglage de la barre au garrot (ou barre de cou : hauteur, distance par rapport à l'arrière de la logette) ; le type de séparation, la pente... Dans les aires de circulation, les sols doivent constituer une surface sur laquelle les vaches peuvent se déplacer en toute sécurité, sans craindre de chutes ou de glissades. Les difficultés de circulation peuvent provoquer une usure irrégulière des onglons et l'apparition de boiteries. De plus, les sols doivent assurer une certaine usure de la corne sans être trop rugueux (risque d'apparition de soles trop fines). Beaucoup souhaitent mettre des tapis, mais attention au manque d'usure. Il faut donc trouver un compromis. Plusieurs types de sols peuvent éventuellement être combinés (ex : tapis face à l'auge et béton dans le couloir entre les logettes).
Activité de l'animal
Un temps passé debout trop important peut causer l'apparition de lésions (bleimes, ouverture de ligne blanche) et de maladies de type fourbure par exemple. L'augmentation du temps passé debout peut s'expliquer par un manque de confort des logettes ; un manque de places à l'auge ; un manque de places à l'abreuvoir ; un nombre insuffisant de logettes ; une surface d'aire paillée insuffisante ; un nombre insuffisant de DAC ou encore des aires d'attentes mal dimensionnées par rapport à la taille du troupeau, quelle que soit l'installation de traite. Il peut également être dû à un temps de blocage au cornadis trop long ou un temps de traite trop long. Dans tous les cas, quel que soit le moment où l'animal reste debout, il ne doit pas piétiner plus d'1 h 30 maximum, notamment au moment de la traite. Les installations de traite et/ou les pratiques (traite, attente aux cornadis...) doivent donc être adaptées pour atteindre cet objectif.
L'hygiène et la santé des pieds
La sous détection des boiteries dans l'élevage engendre une prise en charge tardive des lésions, d'où une aggravation potentielle de ces dernières. Il est à noter que l'ulcère de la sole, lésion grave, ne fait, au départ, que légèrement boiter l'animal, alors que sa prise en charge doit être rapide. En cas de présence de la maladie de Mortellaro dans l'élevage, l'absence de détection régulière des lésions et de désinfection collective des pieds feront « flamber » la maladie. L'absence de parage préventif ou des parages inadéquats dans le troupeau peuvent également engendrer des complications ou la non-détection de problèmes qui risquent ainsi de persister. Si l'hygiène des sols n'est pas maîtrisée, le développement d'agents pathogènes dans l'exploitation va favoriser la prolifération de boiteries d'origine infectieuse au sein du troupeau telles que Mortellaro et fourchet. Il est donc important de veiller à la propreté des logettes, des aires de circulation, de l'aire d'attente de la salle de traite ou de robot de traite, du couloir de sortie de traite, des passages entre logettes, des sorties de bâtiments, etc. c'est-à-dire de tous les endroits où les animaux posent les pieds. Plusieurs techniques sont envisageables, à adapter en fonction des élevages, tel que le raclage automatique. Il est à noter que le raclage doit être adapté à la conduite d'élevage pour être efficace. En effet, un raclage peut être fait 10 fois par jour mais ne servira à rien s'il provoque la formation de « tas » d'excréments dans lesquels les animaux vont marcher. De même, il faudra prêter attention aux zones d'humidité excessive dans le bâtiment, pouvant par exemple être créé par la fuite d'un abreuvoir, l'évacuation de produit de pédiluves ou des zones de stagnation des animaux où bouses et urine peuvent se cumuler (ex : devant les robots). Des zones de surdensité dans le bâtiment peuvent également être des lieux de diffusion des pathogènes. La génétique impacte également la santé des pieds. Il existe en effet un déterminisme génétique à la sensibilité aux affections du pied.
D'après le site : boiteries-des-bovins.fr