Les arbres… cause de discorde
Des distances légales des plantations par rapport au fonds voisin existent. Toutefois, elles ne s’imposent qu’à défaut de conventions, d’usages ou de règlements prévoyant d’autres dispositions.

Question : Ma propriété est délimitée par des grands arbres et mon voisin n’arrête pas de se plaindre que les branches le gênent chez lui. Je sais qu’il existe des distances à respecter par rapport à la limite de propriété, mais j’ai entendu dire que ceci n’était pas applicable aux agriculteurs. Pouvez-vous me dire ce que je dois faire avec mes arbres ?
Réponse : Comme c’est souvent le cas, la réponse est : « ça dépend… ». En effet, des distances légales des plantations par rapport au fonds voisin existant. Toutefois ces distances légales ne s’imposent qu’à défaut de conventions, d’usages ou de règlements prévoyant d’autres dispositions. Il peut s’agir de règlements pris par les mairies ou par les préfets ; les chambres d’agriculture établissent parfois une sorte de code des coutumes et usages locaux.
En cas de désaccord sur l’existence de règlements particuliers, c’est aux tribunaux qu’il appartient de constater souverainement les distances à respecter. Donc, la conduite à tenir dans l’exemple donné, dépend des réglementations applicables dans la région.
En absence de règlements et usages locaux, ce sont les articles 671 et s. du code civil qui déterminent les règles : les arbres, arbrisseaux et arbustes doivent ainsi être plantés à une distance de :
- 2 m de la ligne séparative des deux héritages lorsque leur hauteur dépasse 2 m ;
- 0,50 m de la ligne séparative lorsque leur hauteur est inférieure à 2 m.
(À noter, la réglementation n’est pas la même pour les haies et arbres mitoyens !)
La distance est calculée à partir du centre de l’arbre, sans tenir compte des nœuds et autres irrégularités du tronc.
Concernant l’arbre, objet de la discorde, le voisin pourra exiger qu’il soit réduit à la hauteur de 2 mètres, s’il se trouve à moins de 2 mètres de la limite séparative. Dans le cas où l’arbre se trouve à moins de 0,50 mètre de la limite, il pourra éventuellement même demander l’arrachage de l’arbre, à moins que le propriétaire de l’arbre puisse invoquer la prescription acquisitive.
Pour les branches qui dépassent la propriété, l’article 673 du code civil reconnaît au voisin le droit à l’élagage des branches qui empiètent sur son héritage ; en revanche, il n’a pas le droit de les couper lui-même. Pour les racines, le voisin a aussi le droit à l’élagage. En revanche, ici, il a le droit de couper les racines lui-même à la limite de la ligne séparative (ce qui vaut aussi pour les ronces ou brindilles).
Une question souvent posée, concerne les fruits qui poussent sur les branches dépassant sur la propriété voisine. Pour les fruits tombés naturellement des branches, la solution est claire : le voisin peut les ramasser. En revanche, les fruits qui sont encore sur l’arbre ne sont pas visés par l’article 673 du code civil. Il est donc plus prudent de demander l’autorisation préalable au propriétaire de l’arbre.
En plus des distances et des hauteurs que doivent respecter les propriétaires d’arbres, d’arbustes ou arbrisseaux, il faut veiller à ce que les plantations ne soient pas la cause d’un dommage qui excède ce qu’on doit supporter normalement dans les relations de voisinage. La Cour de cassation, dans un arrêt du 4 janvier 1990, a ainsi ordonné l’abattage d’une rangée de peupliers qui avait été plantée à plus de 2 m de la limite séparative, car les racines envahissaient le terrain voisin et provoquaient des boursouflures du revêtement du sol et les feuilles recouvraient la toiture et la terrasse et nuisaient de ce fait au bon écoulement des eaux.
Pour venir enfin à la réglementation concernant les agriculteurs, la loi ne prévoit rien de particulier. Le fait d’être agriculteur ne vous donne donc pas plus de droit par rapport à un propriétaire d’une profession différente. Mais comme le code civil ne parle que des arbres, arbustes et arbrisseaux, les règles de distance et hauteurs énoncées ci-dessus, ne sont pas applicables aux autres plantes. Ainsi les cultures agricoles, céréalières ou potagères peuvent être faites jusqu’à la limite séparative, bien entendu, sous condition qu’elles ne créent pas de préjudice au voisin.
Le service juridique rural de la FDSEA 26, Nathalie Kotomski