Alcoolisme au travail : que peut faire l’employeur ?

Pour déterminer l'état d'alcoolémie, l'employeur doit tout d'abord pouvoir identifier les signes de troubles du comportement du salarié, lorsque cela est possible. En effet, parfois, le salarié va directement au champ lorsqu'il arrive au travail et l'employeur ne peut donc pas identifier l'état d'ébriété de son salarié. Lorsque celui-ci est manifeste et remarqué par l'employeur, il faut distinguer deux cas : le salarié ivre non dangereux pour les autres et les biens ; le salarié ivre compromettant la sécurité des biens et des personnes.
Distinguer les cas
Dans le premier cas, l'employeur peut s'appuyer sur :
- des témoignages : il est possible de demander aux personnes ayant été au contact du salarié ivre des témoignages attestant de cet état. Mais ce mode de preuve a parfois une efficacité réduite.
- les forces de l'ordre : le cas échéant, l'employeur peut demander aux services de police ou de gendarmerie de venir constater le niveau d'alcoolémie d'un salarié.
- le médecin du travail à l'occasion des visites médicales.
En revanche, l'employeur ne pourra pas faire subir un éthylotest à ce salarié. En effet, la pratique de l'alcootest, qui doit être prévue par le règlement intérieur, est réservée uniquement aux salariés pouvant compromettre la sécurité des personnes et des biens, notamment par l'utilisation de substances chimiques dangereuses ou la conduite de machines.
Dans le deuxième cas, l'utilisation de l'éthylotest sera donc possible mais encadrée :
- cette pratique devra être prévue par une clause du règlement intérieur ;
- ce test devra être pratiqué par le responsable hiérarchique (ou une personne de l'entreprise mandatée par l'employeur) et le salarié sera informé des possibilités qu'une tierce personne soit présente lors du test et de demander une contre-expertise.
Enfin, l'employeur ne peut en aucun cas contraindre ses salariés à des examens sanguins.
Ce qu'il est conseillé de faire
Il est fortement conseillé à l'employeur de réagir immédiatement. Dès lors, il doit accomplir les formalités suivantes :
- appeler le secouriste le plus proche pour obtenir un avis ;
- informer le responsable ;
- accompagner la personne vers un lieu où les risques seront limités ;
- demander éventuellement un avis médical auprès du médecin du travail ;
- en fonction du degré d'alcoolémie : soit reprise du travail surveillée, soit retour au domicile accompagné par un membre de l'entourage personnel, extérieur à l'entreprise.
Par la suite, il est recommandé de rédiger un constat.
A la reprise du travail, il faudra prévoir un entretien de recadrage avec le salarié, le but étant que la situation ne se reproduise plus.
En revanche, il sera délicat de prononcer une sanction importante : l'employeur pourra alors infliger un blâme ou un avertissement.
S'agissant d'un salarié compromettant la sécurité des biens et des personnes, l'employeur pourra prononcer une sanction plus importante allant jusqu'au licenciement. Cependant, cette sanction devra tenir compte du contexte global, notamment des fonctions exercées par le salarié, de son ancienneté ainsi que de son passé disciplinaire.
De l'intérêt de réagir rapidement...
Réagir rapidement présente un double intérêt pour l'employeur :
- s'il ne réagit pas et qu'il laisse travailler un salarié ivre, en cas d'accident du travail causé par son comportement anormal, il s'exposerait au risque de reconnaissance en faute inexcusable ;
- le salarié peut ensuite basculer dans un état d'alcoolisation chronique. Dans ce cas, il sera plus problématique pour l'employeur de prononcer une sanction disciplinaire car celle-ci pourrait être considérée, en cas de contentieux prud'homal, comme une sanction discriminatoire car prononcée en raison de l'état de santé du salarié. n
Le service juridique social de la FDSEA 26,Mathieu Desreux