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Formation

Comment aider nos ados à trouver leur voie ?

Période de transition complexe entre l’enfance et l’âge adulte, naturellement marquée par des bouleversements multiples, l’adolescence marque aussi l’heure des choix des orientations. Mathieu Cassotti, professeur de psychologie du développement et de neurosciences cognitives de l’éducation de l’enfant et de l’adolescent à l’université Paris-Cité, nous prodigue ses conseils éclairés.

Comment aider nos ados à trouver leur voie ?
© Auvergne-Rhône-Alpes orientation

Que se passe-t-il dans la tête de nos ados ?
Mathieu Cassotti : « Toutes les régions du cerveau ne sont pas matures au même moment. Elles se développent en parallèle, mais pas forcément avec la même temporalité. Chez les adolescents, les régions qui sont impliquées dans la réactivité émotionnelle sont matures plus tôt que les régions qui leur permettent de se contrôler et de réguler leurs émotions. Chez les êtres humains, nous avons deux processus distincts. D’une part, notre capacité à ressentir des émotions en réponse directe à une stimulation ou en réactivation à une émotion antérieure. Et d’autre part, la capacité à se réguler. À l’adolescence, il y a une fenêtre développementale particulière où ils peuvent ressentir des émotions, et parfois très fortement, et rencontrer des difficultés à se contrôler. Cela ne veut pas dire qu’ils vont systématiquement se laisser emporter ou que c’est tout le temps compliqué, mais il faut avoir en tête ce phénomène. Lorsqu’il n’y a pas d’émotion, quand ils sont tous seuls, quand le contexte socio-économique est plutôt favorable, ils sont parfaitement capables de se contrôler. »

Pourquoi est-ce si difficile pour eux de se projeter dans un avenir professionnel ?
M.C. : « C’est toujours difficile, pour qui que ce soit, de se projeter dans le futur et encore plus pour un adolescent plutôt centré sur des récompenses instantanées. Nous avons tendance à être beaucoup plus sensibles à ce qui se passe immédiatement. C’est d’autant plus compliqué pour les enfants car, en France, on leur demande très tôt de choisir une orientation, et cette dernière est très peu flexible par la suite. J’ajoute qu’il y a un défaut de connaissance des métiers, alors même que nous n’arrêtons pas d’entendre que nos jeunes vont faire plein de métiers différents. Mais nous restons toujours centrés sur cette idée qu’un cursus mène à un métier spécifique qu’ils vont faire quasiment toute leur carrière. Dans la vie de tous les jours, cela ne se passe pas du tout comme ça, mais l’orientation en France est conçue avec cette idée-là : une formation correspond à un métier. C’est en train de changer. Aux États-Unis, la flexibilité de transfert d’un cursus à l’autre est beaucoup plus courante. »

Comment peut-on accompagner nos ados sur le chemin de leur épanouissement ?
M.C. : « Déjà, en leur expliquant que les choix qu’ils vont faire aujourd’hui ne vont pas graver dans le marbre absolument ce qui va leur arriver dans le futur. Même si c’est compliqué, il existe des flexibilités. Leur dire aussi qu’ils ont le droit de se tromper, qu’ils pourront changer. En clair, il est important de dédramatiser un peu la situation. Cela étant dit, on leur demande tout de même de faire des choix, donc pour le faire de la manière la plus éclairée qui soit, ils ont le devoir de s’informer sur ce qui les anime, sur les métiers qui les intéressent. Il faut absolument se rendre aux journées portes ouvertes, aux journées d’immersion proposées par certains établissements. Il est impératif de poser des questions aux enseignants, aux professionnels, même si elles paraissent bêtes pour bien comprendre la réalité des métiers et, in fine, se dire je m’y projette bien. À l’université, on se rend compte que la plupart du temps, ce que connaissent les étudiants de la discipline et des métiers, correspond à ce qu’ils en ont vu dans les séries télé. Et les séries télé, ce n’est pas la réalité de ce qui se passe sur le terrain. »

En tant que parents, y a-t-il des comportements à proscrire ? Quels sont ceux à encourager ?
M.C. : « Tous ceux qui imposent à leurs enfants de choisir telle ou telle filière doivent se poser la question de pourquoi ils le font. À la fin, ce type de comportement suscite toujours du regret, du ressentiment, des difficultés, et cela n’a pas de sens… L’orientation doit être un choix personnel, car ce que l’on recherche, c’est l’affirmation de soi. Un choix personnel et éclairé. C’est leur vie et pas celle des parents. Le rôle des parents est plutôt de les guider, les soutenir dans leur démarche, les aider à se renseigner, proposer un point de vue… » 

Propos recueillis par Sophie Chatenet

Mathieu Cassotti est co-auteur avec Grégoire Borst du livre « C›est (pas) moi, c’est mon cerveau ! Pour enfin comprendre ce qui se passe dans la tête d'un ado ! » Un ouvrage qui décrypte une période charnière pour l’enfant et ses parents. Éditions Nathan, 2022, 12,90 euros.

Des clefs pour s’orienter

Marine Joseph est conseillère d’orientation et insertion au sein d’Auvergne-Rhône-Alpes orientation, association organisatrice du Mondial des métiers. Cette année encore, elle a pu donner de précieuses clefs au public de ce Salon, afin de les aiguiller dans leur avenir professionnel.

«Nous étions quatre conseillères d’orientation et d’insertion présentes au Mondial des métiers 2024 pour aiguiller le public, leur donner des informations quant aux divers métiers représentés sur le Salon, sur les formations disponibles et les différents leviers d’insertion professionnelle », explique Marine Joseph. Cette dernière a pu rencontrer un jeune public avide de questions, composé de différents profils : pour certains, le Mondial des métiers a été l’occasion de découvrir de nombreux métiers afin de forger des envies, pour d’autres, de confirmer leur orientation professionnelle, ou encore de la préciser grâce à un panel de formations disponibles.
« Nous leur ouvrons le champ des possibles »
« Sur le Mondial des métiers, il existe deux types de jeunes dans le public que nous rencontrons. Ceux qui n’ont aucune idée de ce qu’ils souhaitent faire, ceux qui ont déjà une idée mais qui ont encore besoin d’être orientés pour atteindre leur objectif. Les échanges sont ainsi très différents, notre manière de les orienter également ». Pour ce faire, la première étape consiste à apprendre à connaître le jeune. « Nous échangeons, sur son niveau scolaire, ses intérêts, ce qu’il aime faire et surtout ce qu’il n’aime pas faire. Ainsi, j’établis un profil qui me permet de l’aiguiller vers des métiers correspondants, tout en prenant en compte la durée des études et le niveau de difficulté de ce qui l’attend », explique Marine Joseph. Un échange qui permet, entre autres, de sortir certains collégiens ou lycéens du stress de l’orientation, et de leur laisser la possibilité de découvrir une affinité professionnelle qui leur est propre. « Nous ne sommes pas là pour leur trouver un métier, bien entendu, mais pour leur ouvrir le champ des possibles », précise-t-elle.
Des outils d’aide à l’orientation
En complément d’un échange de vive voix, afin d’affiner certains traits de personnalité, la conseillère a également recours au site régional « O’reka ». C’est sous forme de quiz en 24 questions que les jeunes affineront leurs attraits professionnels. À l’issue du test, le site proposera plusieurs parcours de formation, et le jeune pourra ainsi débuter sa réflexion. « Nous privilégions bien évidemment les échanges en physique. Nos bureaux étant basés à Clermont-Ferrand, nous essayons au maximum de rencontrer les personnes en demande d’orientation, notamment en région », précise-t-elle. L’association est présente chaque année sur de nombreux Salons tels que Studyrama, les journées portes ouvertes d’établissements ou encore la caravane des métiers, associée au ministère de l’Agriculture. 

Charlotte Bayon

Pour toutes questions, demandes d’informations, l’association Auvergne-Rhône-Alpes orientation est disponible par mail : [email protected] ou par téléphone au 04 26 46 00 70.