Les solutions pour réduire l’astreinte de la traite évoluent
Monotraite, modulation des horaires, robots… Les éleveurs qui souhaitent réduire leur temps d’astreinte passé à la traite, sans altérer la qualité du lait, possèdent de nombreuses techniques. Explications.

La monotraite des vaches laitières a fait sa première apparition dans les années 1980 en Nouvelle-Zélande. En France, les essais sur bovins ont démarré en 1996. Ces tests, menés par les unités expérimentales de l’Inra d’Auvergne (devenu Inrae Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes), comportaient deux objectifs : réduire la quantité d’aliments concentrés distribués aux animaux et diminuer l’astreinte des éleveurs.
La monotraite utilisée en fin de lactation
Selon Dominique Pomiès, ingénieur à l’Inrae, qui a suivi ces études et publié des conclusions en 2010, la monotraite provoque systématiquement une diminution immédiate de la production laitière. « Quand cette pratique est appliquée dès le vêlage, l’écart de production augmente rapidement, jusqu’à dépasser les 30 % après le premier mois de lactation, détaille l’expert. Si la monotraite se prolonge durant toute la lactation, cet écart reste stable jusqu’au tarissement. » En revanche, quand la monotraite est mise en œuvre après le pic de lactation durant plusieurs lactations successives, la perte de lait n’est en moyenne que de 25 %. Mais cet écart varie selon la race. Les études menées par l’ingénieur ont démontré que les vaches montbéliardes perdent moins de lait que les prim’holsteins, tandis que dans des conditions similaires, ce sont les tarentaises qui en perdent le plus. Enfin, la réduction des apports d’aliments concentrés chez des vaches en monotraite augmente la perte de lait, par rapport à la seule mise en œuvre de la monotraite. Si ces données sont encore valables aujourd’hui, les pratiques ont toutefois évolué. « À l’époque, nous envisagions la monotraite toute l’année. Mais depuis, nous avons remarqué que les vaches primipares, surtout les prim’holsteins, n’étaient pas à l’aise avec la monotraite en début de lactation, du fait de mamelles gonflées. » Dorénavant, les éleveurs utilisent la monotraite en fin de lactation ou s’ils souhaitent obtenir des vêlages groupés. « Il y a alors moins de lait, mais il sera plus gras », assure le spécialiste.
Traire à 8 heures, puis à 16 heures
Autre changement de pratique : la modulation des rythmes de traite. « Arrêter de traire toutes les 12 heures est une pratique qui rentre de plus en plus dans les mœurs des éleveurs, détaille Dominique Pomiès. Mais certains cahiers des charges rendent cette technique tout bonnement impossible. « En zone de production de saint-nectaire fermier, par exemple, la fabrication doit se dérouler après chaque traite. Les horaires de traite doivent donc être strictement identiques le matin et le soir, puisque plus l’éleveur décale l’heure de traite, plus la composition du lait va être différente. » Selon lui, les fermes qui ne pratiquent pas la fabrication peuvent aisément faire leur première traite à 8 heures, puis la seconde à 16 heures. « Dans la mesure où le lait issu des deux traites est mélangé dans le tank, la moyenne de la matière grasse sera toujours la même », assure-t-il.
Des robots de traite de plus en plus plébiscités
Autre changement notable : l’évolution des robots de traite. Selon Dominique Priès, hors AOP qui n’en permettent pas l’utilisation, la moitié des nouvelles installations ou restructurations d’exploitation comportent dorénavant des robots de traite. « La montée en puissance des processeurs et l’amélioration de l’analyse des données ont rendu l’utilisation des robots de traite bien plus facile. Auparavant, c’était à l’éleveur ou à l’éleveuse d’extraire des données pertinentes. Tandis qu’aujourd’hui, des programmes experts leur simplifient la vie et leur permettent de repérer des vaches qui vont mal, qui ne passent pas souvent à la traite, qui s’agitent ou qui ont des chutes de lait brutales. » Mais cet élan technologique a un coût. Depuis leur apparition en France il y a une vingtaine d’années, le prix des robots de traite est toujours très élevé. « Un seul robot est conçu pour traire au maximum 70 vaches, poursuit le professionnel. Ils semblent donc destinés à des élevages de petite taille, qui, du point de vue des contraintes de travail, seront les plus intéressés. Un Gaec à deux a besoin de plus de souplesse et d’efficacité. Or, à cause du prix élevé, ces exploitations n’ont pas forcément les moyens d’investir dans cet outil. » Résultat : les robots se retrouvent majoritairement au sein de grandes exploitations, par lot de deux ou trois, pour des cheptels de 150 à 200 vaches. « En plus d’avoir les moyens d’investir dans un tel achat, ces Gaec à plusieurs sont également ceux qui peuvent avoir recours à de la main-d’œuvre salariée ou à des associés… » Une adéquation entre la destination et le prix des robots de traite qui risque, à termes, de pénaliser les plus petites exploitations.
Léa Rochon