Nématodes à galle : le double-sorgho court comme solution
Face à la forte présence des nématodes à galles dans les cultures maraîchères sous abris dans le grand quart Sud-Est de la France, une expérimentation a permis de mettre en avant l’importance d’un double sorgho court pour enrayer la prolifération des ravageurs.

«Comment réduire les nématodes à galles grâce au double-sorgho court ? » C’est le thème d’un atelier qui a été proposé lors du Salon Tech&Bio le 21 septembre dernier à Bourg-lès-Valence, sur le stand maraîchage. Les nématodes à galles, de genre Meloidogyne spp., sont des ravageurs du sol microscopiques qui entraînent des dégâts considérables dans les exploitations maraîchères. Par leur présence, elles peuvent engendrer une baisse de rendement considérable sur des cultures cibles, telles que les tomates, les courgettes, les concombres, etc. « C’est une problématique qui touche essentiellement la grande région Sud-Est », explique Laurent Camoin, ingénieur conseil en maraîchage à la chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône. Lors des suivis d’exploitations, le conseiller a dû faire face à une problématique importante rencontrée par l’EARL Bioval, tenue par Magali Girard et Édouard Aymard à Entressen (Bouches-du-Rhône) : une forte pression des nématodes à galles dans leurs serres. Il leur propose alors une technique dont les résultats sont à l’époque, en 2016, encore expérimentaux : l’implantation d’un double-sorgho court pour piéger les nématodes dans les racines et ainsi abaisser fortement leur présence dans le sol. Cette méthode, étudiée par l’association provençale de recherche et d’expérimentation légumière (Aprel) dans le cadre du programme Gedubat1, vise à semer du sorgho fourrager à haute densité (minimum 100 kg / hectare) sur un sol travaillé en surface.
Rompre le cycle des nématodes
« Une forte densité de semis du sorgho permet d’avoir le plus de racines possibles. Car ce sont dans les racines que les femelles nématodes fécondées se développent. L’idée est de laisser pousser le sorgho trois semaines maximum : la femelle n’a alors pas le temps de pondre ses œufs pour contaminer le sol. En détruisant les racines trois semaines après le semis, le cycle de développement des nématodes est rompu. Ainsi, le sol se vide de sa population de nématodes à galle », explique Laurent Camoin. Il est ensuite préconisé de laisser sécher le sol quelques jours (de 2 à 4 selon les températures), avant de semer à nouveau un sorgho et répéter l’opération. « Cette technique permet d’assainir les sols et d’affaiblir le potentiel des nématodes », souligne-t-il. La température adéquate du sol pour la bonne réussite de cette technique est de 25 °C. En deçà, il est important de prendre en compte les différents paramètres du sol et des plantes. « C’est une technique peu coûteuse (environ +/- 0,04 €/m²) et rapide à mettre en place entre la mi-avril et la mi-septembre. De plus, le sorgho permet de remettre une culture maraîchère rapidement derrière », indique Laurent Camoin.
Vers une reconception globale du système
Au sein de l’EARL Bioval, les résultats sont probants. Bien plus qu’avec la mise en place de la solarisation (technique consistant à élever la température dans les couches superficielles du sol pour détruire certains agents pathogènes, ndlr), qui s’est avérée non suffisante. L’ingénieur conseil maraîchage recommande d’ailleurs de combiner à la technique du double-sorgho plusieurs méthodes pour observer une forte baisse de la population ravageuse, dont la solarisation. « Cette technique doit être combinée à une reconception globale du système ». Sont notamment évoqués la rotation des espèces, le moindre travail du sol, l’apport d’amendements organiques massifs en surface, etc. Cette technique nouvelle, fiabilisée depuis la saison 2019-2020, est toujours en développement. « Pour l’heure, la technique a été développée uniquement sous abri. Toutefois, de nombreuses perspectives sont encore à l’étude. Il est notamment question de retravailler sur la densité de semis, mais aussi sur d’autres variétés de sorgho ou d’autres espèces intéressantes sur un cycle aussi rapide », ajoute Laurent Camoin. Avant de conclure : « À ce jour, l’Aprel suit encore l’exploitation EARL Bioval dans le cadre du programme Gonem2 en analysant précisément l’évolution des indices de galle sur les racines. Les essais se poursuivent », conclut-il. Par ailleurs, le réseau Dephy Ferme travaille sur la protection intégrée des cultures et l’implantation de plantes pièges à intégrer dans les systèmes de rotation.
Amandine Priolet
1 - Programme Ecophyto Dephy Expe 2012-2017 porté par le CTIFL.
2 - Programme PEI 2018-2021 porté par le Graab sur la gestion des nématodes à galles.
