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Diversification

Avec Rimon et Saveurs, les pâtes prennent de la hauteur

A Rimon-et-Savel, le Gaec des cimes s'est lancé dans la fabrication artisanale de pâtes alimentaires voici quatre ans. Des pâtes bio produites avec des céréales de l'exploitation cultivées entre 900 et 1 200 mètres d'altitude.
Avec Rimon et Saveurs, les pâtes prennent de la hauteur

 Rimon-et-Savel est une petite commune qui domine la vallée de la Roanne. Elle compte une trentaine d'habitants permanents et deux hameaux : Savel, à 600 mètres d'altitude, et Rimon, à 1 000 mètres. Gérard Lefranc y est agriculteur depuis plus de trente ans. Lorsqu'il s'est installé, c'était une ferme traditionnelle centrée sur l'élevage de moutons et la culture de la lavande.
Son épouse, Claire, l'a par la suite rejoint. Douze ans plus tard (lorsque leurs deux enfants étaient au lycée), elle est partie travailler à l'extérieur pendant quelques années. Puis elle est revenue sur l'exploitation. « J'avais envie de développer une activité nouvelle sur notre ferme, pour la booster, la valoriser car elle est petite et les rendements sont peu élevés », explique l'agricultrice. Et, comme « Gérard a toujours été intéressé par les céréales, nous avons cherché une activité autour de ces productions ». Mais que faire ? Du pain ? Une offre existait déjà sur le secteur. Par contre, il n'y avait pas de fabricant de pâtes sèches. Une étude de faisabilité a montré que « cela semblait jouable en termes de débouchés, qu'il y avait une demande locale ». Alors le projet de produire des pâtes avec des céréales bio cultivées sur l'exploitation a été lancé.

 

 Hameau de Rimon (1 000 mètres d'altitude). Les pâtes sont fabriquées dans un bâtiment en bois situé juste au-dessous de la bergerie de du Gaec des cimes.    

Une fabrique bien équipée

Pour leur nouvelle activité, Claire et Gérard Lefranc (Gaec des cimes) se sont dotés d'un bâtiment spécifique (en bois) situé à côté du hameau de Rimon, juste au-dessous de leur bergerie. « Nous avons fait le choix d'un atelier de transformation suffisamment grand et bien équipé pour travailler dans de bonnes conditions et produire de la qualité, indique Claire. Nous voulions aussi pouvoir faire visiter notre atelier. D'ailleurs, depuis deux ans, nous participons à l'opération De ferme en ferme. »
Trieur de céréales, brosse à grains, moulin, presse extrudeuse, séchoir, ensacheuse ont été installés dans les locaux. Le tout a coûté 120 000 euros. Le Gaec des cimes a bénéficié d'aides, de l'Europe et de la Région (dispositif Eli*) ainsi que du Département, à hauteur de près de 50 % de l'investissement total.

Blé dur du Gaec des cimes. Gérard Lefranc moissonne.

18 références

L'atelier a été monté à la fin de l'année 2012. Avant de démarrer la fabrication de pâtes, « nous sommes allés voir des producteurs en Isère, confie Claire. Après avoir un peu tâtonné au début, nous sommes arrivés à une qualité de produit intéressante ». Les premières pâtes bio artisanales du Gaec des cimes ont été produites en avril 2013.
Pas moins de dix-huit références de pâtes sont aujourd'hui proposées sous la marque « Rimon et Saveurs »  : au blé dur natures ou aromatisées (tomate-olive, basilic-aïl-huile d'olive, ail des ours, oignon-piment, curry) mais aussi au petit ou au grand épeautre. Elles sont emballées en boîtes carton de 250 grammes, en sachets de 500 grammes ou dans des conditionnements plus grands (pour des cantines scolaires, par exemple). Sont aussi vendues de la semoule de blé dur, ainsi que de la farine de blé, seigle et épeautre pour rentabiliser le moulin (valorisée en direct et en magasins de producteurs).

 

Une assise intéressante

Les pâtes Rimon et Saveurs sont commercialisées ponctuellement à la ferme, sur des foires, salons, en magasins de producteurs, dans la restauration collective et quelques commerces. « Grâce aux pâtes, observe Claire, nous nous sommes retrouvés dans des réseaux. Le collectif est intéressant car il renforce le lien social. »
Sur ses trois premières années, la nouvelle activité a connu une évolution constante. En 2016, sept tonnes de pâtes sont sorties de l'atelier de transformation. La surface de l'exploitation pouvant être consacrée à la production de céréales dédiées aux pâtes peut encore augmenter mais légèrement. L'an passé, le Gaec des cimes a également cultivé des lentilles vertes. Un produit supplémentaire, pour mieux rentabiliser l'investissement, notamment en temps passé dans les livraisons... « La transformation de nos céréales en pâtes donne une assise intéressante à notre ferme », assure Claire Lefranc. Et c'est d'autant plus important que Loïc, le fils, s'est installé voici un an sur l'exploitation, la seule ferme encore en activité à Rimon-et-Savel.

Annie Laurie

* Dispositif Eli : soutien accordé de 2007 à 2013 à des entreprises localement innovantes pour des projets agriruraux.

 

Le Gaec des cimes

Petit épeautre du Gaec des cimes.
3 associés : Claire, Gérard et Loïc Lefranc.
Exploitation totalement en agriculture biologique.
250 hectares à Rimon-et-Savel dont une trentaine labourables (jusqu'à 1 250 mètres d'altitude).
Elevage ovin viande : 240 mères Préalpes du Sud. Autonomie pour l'alimentation du troupeau : pâturages (jusqu'à 1 300 mètres d'altitude), fourrages et céréales. Agneaux commercialisés en direct (sur commandes), principalement auprès de particuliers.
6 hectares de lavande destinés à la production d'huile essentielle avec la Sica Bioplantes (Gigors-et-Lozeron).
Depuis 4 ans, développement de la culture de céréales (blé dur, blé tendre, petit et grand épeautre) pour la fabrication de pâtes bio.

Du grain aux pâtes

Trieur et moulin. Le séchoir.
Comme la culture des céréales du Gaec des cimes, le process de transformation est lui aussi en bio. Une fois triés et brossés, les grains sont écrasés dans un moulin à meules de pierre qui « tourne à vitesse lente et préserve leurs qualités, souligne Claire Lefranc. Ce n'est pas une farine extra-épurée donnant des pâtes blanches. Mais elle est de qualité : les analyses révèlent un taux de sucre 2,5 fois supérieur à celui des pâtes industrielles ».
Sur le principe, après mélange de la semoule et l'eau, la préparation est transformée en pâtes avec une presse extrudeuse. Plusieurs filières (embouts) sont utilisées afin d'obtenir des pâtes de différentes formes. Au Gaec des cimes, elles ont pour nom coquilles, dentelles, casarecces, miniss, colosses ou hélices. L'étape suivante est le séchage sur des claies à une température de 30 à 35°C. Les pâtes restent dans le séchoir autour de 24 heures, selon le remplissage de celui-ci et leur forme.

 

EARL Delimo / A côté de Valence, un jeune agriculteur fabrique lui aussi des pâtes avec des céréales de la ferme. L'activité devrait démarrer en février.
Samuel Jacquet se lance dans les pâtes
 Samuel Jacquet dans le local accueillant le trieur, la brosse, le moulin et la tamiseuse.
Agé de 23 ans, Samuel Jacquet est agriculteur à Beaumont-lès-Valence depuis juin 2016 avec son père, Dominique, au sein de l'EARL Delimo. Il représente la huitième génération sur cette ferme familiale qui cultive aujourd'hui 60 hectares de grandes cultures, 7 d'abricotiers et pratique le non-labour depuis 18 ans.
Valoriser le blé dur de l'exploitation en fabriquant des pâtes, l'idée a germé dans l'esprit de Samuel voici deux ans. Il a bien réfléchi son projet. Il a visité plusieurs exploitations produisant des pâtes, afin de concevoir un atelier de transformation fonctionnel, le mieux adapté possible. Il s'est fait accompagner par la chambre d'agriculture : étude de faisabilité économique, formation marketing-vente directe...
Un projet bien ficelé
« Terre de blé », la marque de Samuel Jacquet pour ses pâtes destinées aux magasins de producteurs, à la restauration collective, aux comités d'entreprise, restaurants, marchés. « Sam&pâtes », la marque déposée par Samuel Jacquet pour la grande distribution.
Pour la fabrication des pâtes, un bâtiment (de 94 m²) a été construit et un silo (d'une capacité de 55 tonnes) a été installé à côté. Trieur, brosse à grains, moulin, tamiseuse, presse extrudeuse, séchoir, ensacheuse... équipent l'atelier. Tout compris, l'investissement s'élève à quelque 210 000 euros. Le projet est subventionné dans le cadre du PCAE(*) à hauteur d'environ 40 000 euros.
Dans un premier temps, Samuel fabrique des coquillettes, tortis et pennes. « Des pâtes de qualité traditionnelles pour toucher un public large, précise-t-il. Mon objectif est d'en produire cinq tonnes en 2017, dix en 2018 et trente-cinq à terme. »
Pour la commercialisation, le jeune agriculteur cible la grande distribution, des magasins de producteurs, la restauration collective, des comités d'entreprise, restaurants, marchés... Et il a déposé deux marques : « Sam&pâtes » pour la grande distribution, « Terre de blé » pour les autres circuits. Le coup d'envoi de la fabrication a été donné le 6 février.
A.L.
(*) PCAE : plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (co-financement Europe et Département dans le cas de Samuel Jacquet).