Les Vignerons engagés s’exaltent à Tain
Près de 300 personnes ont assisté à la onzième rencontre du label Vignerons engagés à Tain-l’Hermitage, mercredi 12 et jeudi 13 mars.

Créé en 2010, le label Vignerons engagés ne cache pas son ambition. Voilà qu’il organisait sa onzième édition des rencontres entre adhérents. Finies les illustres « Rencontres des vignerons engagés », place aux « Rencontres du vin de demain ». Un nouveau nom pour cet événement qui sonne comme un nouveau cap à suivre. « Nous sommes à une phase charnière durant laquelle la société se réinvente et donc, nous, filière vitivinicole le devons aussi », expose Rémi Marlin, président de l’association et directeur général de la Cave de Buxy, située en Saône-et-Loire.
Un réseau qui s’étoffe
La volonté d’agir et de se tourner vers l’avenir s’intensifie pour Vignerons engagés. Cet engagement qui repose sur les trois piliers de l’économie sociale et solidaire (économie, social et environnement) réunit de plus en plus de professionnels du raisin. « Nous mesurons bien le chemin parcouru, observe Ludovic Beau, directeur général de la Cave de Tain. En 2013, le réseau s’était rassemblé dans le département, à Jaillance. Nous étions au grand maximum une soixantaine ».
Amélie Petit, responsable développement de l’association Vignerons engagés, Rémi Marlin, président, Iris Borrut, directrice, Claude Laÿs, président de la Cave de Tain et Ludovic Beau, directeur général. ©ME-AD26
Aujourd’hui, les Vignerons engagés viennent en nombre lors des rencontres de l’association. Les 300 invités présents durant les deux journées des mercredi et jeudi 12 et 13 mars viennent de toute la France. « C’est une grande fierté et un challenge d’accueillir autant de monde car ça demande une grande organisation. Nous avons une personne qui s’occupe de l’événement depuis le mois de septembre », renchérit Ludovic Beau. Les rencontres réunissent des professionnels de tous les métiers qui gravitent autour du vin : des vignerons, en passant par les techniciens, les commerciaux et les chargés de marketing.
Sonder les attentes
Chacun peut participer jusqu’à quatre ateliers parmi une dizaine de choix : œnotourisme inclusif, Biochar pour s’adapter à la sécheresse, réglementations RSE, nouveaux récits et marketing, visite de vignoble… « Pour les vignerons, c’est un moment de partage, sur des expériences et des techniques. Les ateliers entrent dans une démarche globale en lien avec le développement durable. Ils permettent de prendre de la hauteur sur son métier », estime Claude Laÿs, président de la Cave de Tain et vigneron à Érôme. Le label repose sur quatre piliers : agir pour l’environnement, garantir une qualité de la vigne au verre, soutenir le patrimoine local et offrir le juste prix pour le consommateur et le producteur.
Pour faire face aux défis d’avenir, l’association Vignerons engagés anticipe les attentes des consommateurs. Elle a commandé une enquête à l’institut de sondage OpinionWay qui a été réalisée en janvier sur un échantillon de 2 054 personnes. 74 % des Français estiment qu’un vin durable doit garantir des conditions économiques équitables (juste rémunération, bien-être des travailleurs). Des chiffres encourageants pour ces professionnels engagés pour l’avenir de leur filière.
« C’est énorme ce que vous incarnez »
En guise d’introduction des journées, les professionnels ont suivi une conférence animée par Matthieu Dardaillon, écrivain et co-fondateur de l’école Ticket for change.
En plus de son livre « anti-chaos », Matthieu Dardaillon a créé une newsletter pour « mieux agir et mieux vivre dans notre monde en grande transition » : Redessiner le monde. ©ME-AD26
L’intervention d’une heure et demie est allée droit au coeur des professionnels. Matthieu Dardaillon, auteur du livre Anti-chaos, a présenté quelques-unes de ses réflexions autour du « brouillard décisionnel », « le pouvoir d’agir », ou encore du « changement de modèle ». Selon lui, nous sommes proches de la jonction entre « l’ancien monde qui tarde à disparaître » et le « nouveau monde qui tarde à apparaître». Un ancien monde qui place « l’économie comme finalité » contre un nouveau qui priorise le mieux-vivre. Ainsi, en se basant sur de multiples recherches scientifiques, l’intervenant déroule une analyse de la situation actuelle face à laquelle de nombreuses personnes se sentent comme dans « le brouillard » ou encore « perdus » et désemparés.
La force du collectif
Matthieu Dardaillon invite son auditoire à faire quelques petits exercices : « Quelle vision avez-vous de vous, de votre organisation dans dix ans ? » ou encore « quelles personnes vous inspirent ? ». Les professionnels se prêtent au jeu. « S’autoriser à rêver » et faire confiance à sa « boussole intérieure » car « votre vision est votre étoile polaire ». Le conférencier donne quelques conseils pour « cultiver sa clarté » : le vide, la marche, l’écriture, moins d’écrans, le co-développement avec les autres… Il conseille d’établir un « point A » pour identifier où nous sommes maintenant dans nos vies, un « point B » qui désigne le prochain pas qui mènera au « point C », c’est-à-dire la vision finale, ce que nous souhaitons devenir ou faire dans le futur. Matthieu Dardaillon encourage chacun à adopter des visions sur les court et long termes comme pour se fixer un cap et continuer d’avancer « malgré l’incertitude ».
Enfin, il expose aussi le modèle des quatre saisons et explique que chacun d’entre nous peut connaître des périodes moins actives ou de remises en question et que ces cycles peuvent faire émerger la nouveauté. Pour finir, le conférencier vante le pouvoir du génie collectif aussi appelé « scenius ». Diversité de pensées et d’expériences, appréciation mutuelle, effets de réseau, périodes chaotiques caractérisent ce type de force collective. Elle emmène le changement. « Pour changer le système, des études montrent qu’il suffit d’une minorité de personnes engagées, conclut Matthieu Dardaillon. Vous représentez 5 % du vignoble français. C’est énorme ce que vous incarnez. Vous pouvez créer une bascule et inspirer les autres à vous suivre ». Applaudissements. « Je me demandais si j’étais dans le bon écosystème. La réponse est oui, je dois persévérer. Merci », a témoigné un vigneron visiblement touché par la présentation.
Le réseau Vignerons engagés en chiffres
- 5 % du vignoble français.
- 6 500 salariés viticoles.
- 4 800 exploitations viticoles.
- 2e label environnemental le plus connu de France après le label bio.
- 70 % des 25-34 ans jugent essentiel que le vin respecte des critères de durabilité.