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Formation

« Nous devons travailler fortement  sur l’attractivité des métiers »

Le renouvellement des générations est l’un des enjeux majeurs de l’enseignement agricole, et plus largement du monde agricole. Pour le directeur régional de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) en Auvergne-Rhône-Alpes, Bruno Ferreira, c’est avec l’ensemble des maillons de la chaîne, que ce défi pourra être relevé.

« Nous devons travailler fortement  sur l’attractivité des métiers »

Quels sont les enjeux de l’enseignement agricole en région pour cette nouvelle année ?
Bruno Ferreira : « Nous partageons les mêmes objectifs que l’ensemble des régions françaises. Le premier et le plus prégnant demeure celui du renouvellement des générations en agriculture. Nous visons une augmentation de 30 % de nos effectifs dans les métiers de la production, en adaptant, notamment, notre offre de formation autant au secteur qu’au territoire. Il ne faut pas oublier que pour certains territoires, qui connaissent le plein emploi, les activités agricoles ou encore de transformation alimentaire sont majoritaires. L’enjeu de ce renouvellement y est très prégnant. Pour remplir notre objectif, nous devons donc travailler fortement sur l’attractivité de ces métiers, de mieux les faire connaître. C’est dans ce sens que le projet de loi d’orientation agricole (PLOA) prévoit de former des référents qui parleraient positivement de leur métier. C’est tous ensemble, les équipes des établissements, les professionnels des secteurs, mais également le rectorat de la région académique, qui nous soutient, que nous y parviendront. »

On remarque une grande mixité sociale dans les origines des élèves et étudiants. La part des parents agriculteurs exploitants est de seulement 7 %. Dans l’esprit populaire, cela est beaucoup plus important. Comment préparer les jeunes non issus du milieu à intégrer le monde agricole ?
B. F. : « Cette tendance n’est pas nouvelle et il est primordial que nous arrivions à casser cette image. Le milieu agricole doit communiquer, aller vers ce nouveau public. L’objectif du projet de loi d’orientation agricole, qui vise que chaque élève ait au moins une fois passé la porte d’une ferme, est primordial pour faire connaître les réalités du métier d’agriculteur. La mise en place d’un mentorat personnalisé en fonction des acquis est également envisageable. »

L’apprentissage semble être porteur pour l’enseignement agricole. Est-ce une réalité en Auvergne-Rhône-Alpes ?
B. F. : « Nous constatons une hausse tous les ans, même s’il semble que nous atteignons un palier aujourd’hui. Il est certain que l’apprentissage est essentiel pour l’attractivité de nos métiers, car c’est sur le terrain, les mains dans le cambouis, que les futurs professionnels se rendent compte de la réalité des métiers de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Nous espérons que cette dynamique se poursuivra. Là, demeure tout l’enjeu des discussions budgétaires que nous connaissons actuellement. » [À l’automne dernier, l’État a annoncé vouloir supprimer les aides à l’embauche des apprentis. NDLR.] »

Le projet Actife* a été lauréat de France 2030. Pouvez-vous nous présenter le projet ?
B. F. : « Pour ce projet Actife, tout s’est noué à Brioude (Haute-Loire) lors des finales des championnats de France de rugby des lycées agricoles en mai 2023. L’ensemble des acteurs avait la volonté de sortir du cadre, de mettre en place un projet innovant autour de l’image des métiers de l’élevage allaitant et de leur attractivité. Il a été lancé à Cournon lors du Sommet de l’élevage en octobre dernier. Le projet vise, en cinq ans, avec l’appui de sept établissements d’enseignement technique et supérieur agricole de la région Auvergne-Rhône-Alpes, de passer de 4 500 à 10 000 la cohorte actuelle de formés. Il répond à un double enjeu : valoriser les atouts des systèmes d’élevage herbager pour maintenir la production contribuant au bien-être animal, à la préservation de la biodiversité et à l’atténuation du changement climatique, mais aussi un enjeu de renouvellement des générations. Lauréat le 18 juin 2024 de France 2030, Actife est doté d’une aide de 3,5 millions d’euros. Il est porté par l’EPLEFPA de Brioude-Bonnefont (Haute-Loire). Il rassemble un consortium de vingt membres issus de différentes catégories d’acteurs : organismes de formation ou d’accompagnement, donneurs d’ordre publics, et employeurs et représentants de la profession. » 

Propos recueillis par Marie-Cécile Seigle-Buyat

*Actife : Accompagner les transitions et l’installation dans le Massif central par la formation en élevage.
Zoom sur…

L’éducation socio-culturelle, marque de fabrique de l’enseignement agricole

L’éducation socio-culturelle est une matière à part entière au sein des établissements d’enseignement agricole. Une spécificité revendiquée par ses représentants.
Depuis leur création par le ministre de l’Agriculture, Edgard Pisani, il y a plus de soixante ans, les établissements d’enseignement agricole ont intégré dans leur cursus l’éducation socio-culturelle. « C’est un marqueur fort, note Matthieu Prevost, directeur adjoint de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) d’Auvergne-Rhône-Alpes et chef du service régional de la formation et du développement. L’objectif est de former les futurs professionnels dans leur citoyenneté, qu’ils trouvent leur place en tant que citoyens dans la société. » Ainsi, l’éducation sociale, artistique et culturelle est mise en œuvre au travers d’un enseignement obligatoire, spécifique, mais également d’activités d’animation sur les autres temps de vie scolaire. « Il y a au moins un référent par établissement dont un tiers de son temps est dédié à l’animation de ce type de projets. L’objectif est de faire sortir les apprenants de l’établissement. Nous nouons des partenariats avec des associations, nous rencontrons des artistes… Tout s’orchestre autour de projets spécifiques. Cette approche par le projet permet de mobiliser les jeunes de manière concrète », poursuit Matthieu Prevost.
Engagement personnel
Poursuivre cet engagement hors des murs de l’établissement est également possible et valorisable pour les élèves de manière individuelle. En effet, les jeunes qui donnent de leur temps personnel au profit d’une association ou d’une cause particulière ont la possibilité d’obtenir des points supplémentaires pour l’obtention de leur diplôme. « L’épreuve facultative E8 permet aux jeunes de valoriser leurs différents engagements citoyens. Par exemple, dans le Puy-de-Dôme, il existe un partenariat avec le service départemental d’incendie et de secours (Sdis) qui permet aux élèves jeunes sapeurs volontaires de poursuivre leur engagement sur la commune rattachée à leur établissement scolaire la semaine, tout en étant affectés à la caserne de leur domicile le week-end », illustre le chef de service de la formation. 

Marie-Cécile Seigle-Buyat