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Vendanges

Un millésime tardif pour les vins de la vallée du Rhône

Avec dix jours d’écart, le millésime 2024 s’annonce comme plus tardif que ceux de 2020 et 2022 (record de précocité). Les dates de vendanges se rapprochent ainsi des moyennes décennales.

Un millésime tardif pour les vins de la vallée du Rhône
©Archives AD26

«Le millésime 2024 aura vécu, comme les deux millésimes précédents, des aléas climatiques importants se traduisant par une certaine hétérogénéité volumique et un travail accru dans la vigne », résume Inter Rhône dans une note publiée début septembre. Sur la partie septentrionale, le millésime 2024 s’annonce plutôt tardif, similaire à 2019. Les parcelles sur sols profonds avec des réserves utiles en eau, montrent un retard de maturité plus marqué (notamment sur les Crozes-Hermitage blancs). À l’inverse, les coteaux de Cornas par exemple sont proches des maturités de l’année dernière en termes de degrés. Le poids des baies est globalement dans les moyennes hautes. Le millésime montre une tendance hétérogène dans l’évolution des maturités et un écart dans le potentiel de rendement.

Plus de peur que de mal

Le savoir-faire des vignerons de la vallée du Rhône aura été mis à l’épreuve au fil des mois. L’hiver dernier a été l’un des plus chauds enregistré dans les vignobles de la vallée du Rhône et s’est montré relativement sec, déclenchant le débourrement précoce de la vigne. La douceur des températures s’est poursuivie en mars mais les pluies ont été abondantes, comblant ainsi le déficit en pluviométrie enregistré depuis le début de l’automne. La vigne a donc pu se développer sans stress hydrique sur cette période. En avril, la phénologie avait 10 à 15 jours d’avance par rapport à 2023 avec une certaine hétérogénéité dans une même parcelle et entre parcelles sur une même zone. Le risque de mildiou a été élevé au moment du débourrement, notamment sur les cépages plus sensibles comme le grenache. La climatologie du début d’été (vent et absence de pluie) a permis de faire redescendre ce risque à un niveau modéré.
Entre le 19 et le 21 avril, le gel a touché certains vignobles de la vallée du Rhône. Des dégâts plus ou moins importants ont pu être constatés notamment dans le Luberon, le Ventoux et le Diois et sur le secteur de Crozes-Hermitage pour la partie septentrionale.
En mai, les cumuls des précipitations ont été supérieurs à la normale sur la quasi-totalité du vignoble rhodanien. Ces conditions météorologiques ont permis de compenser la précocité du débourrement de la vigne. Ainsi, les parcelles ont réalisé leur floraison quasiment en même temps que l’année dernière. À la mi-juillet, la maturité des raisins, notamment sur la partie méridionale du vignoble, accusait un retard d’environ une semaine par rapport à l’avancée de la maturité à la même période en 2023. Début septembre, le bon état sanitaire du vignoble se maintenait avec une dynamique du poids des baies au-dessus de la moyenne des millésimes précédents.
« D’un point de vue quantitatif, le mildiou a pu impacter les rendements sur certaines zones mais ils restent dans la moyenne des derniers millésimes, observe Inter Rhône. Les bonnes conditions météorologiques de l’été ont permis d’assainir la récolte. Les vendanges ont ainsi démarré dans un contexte très favorable aux conditions de maturation notamment grâce aux amplitudes thermiques entre le jour et la nuit. »

Premières tendances en cave

« Les précipitations ont fortement impacté l’équilibre acide, entraînant une diminution sensible de l’acidité totale (AT). Pour rééquilibrer les moûts, il est recommandé d’envisager des ajouts d’acide tartrique et malique, particulièrement sur les blancs et rosés (demander une analyse M08) », indique l’ICV dans une note du 12 septembre. L’utilisation de la levure acidifiante Blizz a donné de très bons résultats en cave, avec une production d’acide lactique allant de 2 à 8 g/l. Il est donc conseillé de l’utiliser sur une partie des volumes, en concertation avec votre œnologue.
Les rosés rentrés en cave peuvent présenter des teintes parfois difficiles à gérer, notamment sur le grenache, qui peut présenter des nuances jaunes à marron. Les presses, quant à elles, montrent une coloration plus intense que l’an passé. Dans une logique de gestion raisonnée des intrants de collage, la mesure de la couleur par chromamétrie (Lab*) revêt un intérêt significatif : elle permet d’évaluer la quantité de couleur dès le moût de départ, d’ajuster la dose et le type de colle, puis de contrôler à nouveau en fin de fermentation alcoolique (vers 1010 densité) pour s’assurer que les objectifs sont atteints, indique l’ICV.
Les états sanitaires parfois fragiles doivent être surveillés de près. Le dosage de l’acide gluconique sur les contrôles de maturité ou vos moûts est un bon indicateur pour identifier les parcelles présentant une dégradation sanitaire. Les faibles volumes de récolte cette année, ainsi que les exigences des marchés de vrac ou de bouteilles, demandent à prendre les bonnes décisions pour ce millésime : choix de la date de récolte, allotement des parcelles, type de vinification en fonction du potentiel des raisins, et gestion des faiblesses du millésime (milieu de bouche, végétal, amertume, couleur, etc.). « L’enzymage des rouges, l’utilisation de levures spécifiques (LSI : Booster blanc ou rouge, Punchy), ainsi que l’emploi d’alternatifs bois en vinification, seront des outils précieux pour optimiser la qualité de vos vins », conclut l’ICV.