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RENCONTRE

Au Gaec des Forestiers, élevages bovin, ovin, équin et canin en famille

À Val-Maravel, aux confins du Haut-Diois, Jean-Rémi et Laure Lesurques se sont installés en Gaec. Ensemble, ils ont choisi un modèle économique très diversifié qui leur permet d’allier leur métier à leurs passions en gérant différents élevages.

Au Gaec des Forestiers, élevages bovin, ovin, équin et canin en famille
Au Gaec des Forestiers, Jean-Rémi et Laure Lesurques, ici avec leurs enfants, allient leur métier à leurs passions en gérant différents élevages. © EP_AD26

Il suffit de tourner à gauche à l’entrée du village de Beaurières et de parcourir quelques kilomètres pour arriver à Val-Maravel. D’une vallée à l’autre, le village et ses hameaux, enclavés, proposent un paysage bien différent du reste du Diois. En 2008, Laure Lesurques s’y est installée en tant qu’éleveuse bio en ovin. Fille d’agriculteurs, elle a repris une partie du cheptel de sa mère, dont l’exploitation est également située dans le village. Quelques années plus tard, son mari, Jean-Rémi Lesurques, salarié agricole, l’a rejoint et s’est lui aussi installé. Le Gaec des forestiers était né, sur 150 hectares, dont une grande partie de landes et de chemins.
À leurs débuts, les saisons ont été compliquées en alpage. « On a vécu des années difficiles où le loup a vraiment décimé une grande partie de notre troupeau de brebis », raconte l’éleveur encore marqué par cette période. Pour se diversifier et faire face, le couple d’agriculteurs a choisi de constituer un cheptel de bovins. Ce sont une quinzaine de vaches Galloway, une race écossaise, qui le composent. Pour eux, le choix de cette race était évident. « Elles sont rustiques, avec un pied large adapté à notre sol argileux et elles sont super autonomes », souligne l’agriculteur. Le couple a également des chevaux, en pension, pour l’élevage ou pour le loisir. Une passion que les deux agriculteurs et leurs enfants partagent en famille.

Diversifier grâce aux chiens

Après son installation, Jean-Rémi voulait adopter un chien, ils ont donc accueilli un premier Border Collie. Au fil du temps, cette passion s’est transformée en une activité de plus : l’exploitation compte un élevage de Borders Collies, des épagneuls de Münster ou encore des Parsons Russels Terriers. Une plus-value qui compte beaucoup dans leur modèle économique puisque Jean-Rémi participe à des compétitions de chiens de troupeaux et a ajouté le métier de formateur et expert-confirmateur Borders Collies à son arc.
Le couple a d’ailleurs un petit troupeau d’une dizaine de brebis mérinos pour la compétition et les entraînements des chiens. Il propose aussi du dressage : « Je fais des compétitions nationales et internationales, détaille-t-il. Tout cela a un lien avec l’équilibre économique de la ferme. Pour pouvoir faire des concours, j’ai besoin de fonds, et les formations nous permettent un équilibre ». Et il faut dire que le Gaec s’est fait une belle réputation : les clients pour les formations viennent de France, de Suisse, d’Italie, d’Espagne ou encore de Belgique. Des concours de chiens de troupeaux sont organisés régulièrement sur l’exploitation.

Un équilibre fragile à préserver

Tout cet équilibre est très fragile mais le Gaec se gère en famille. Les éleveurs vendent des chiots, des génisses, des taureaux ou des vaches et bien sûr de la viande. Ils sont en circuit court, au plus près des particuliers au local ou au régional, et sont usagers de l’abattoir intercommunal de Die, géré par les éleveurs du territoire et où Jean-Rémi a travaillé pendant plusieurs années.
Si cette diversification leur permet un travail varié, le couple de quarantenaires reconnaît que le quotidien est souvent difficile. Jean-Rémi évoque par exemple ce cheval blessé le dimanche précédent et aucun vétérinaire de disponible pour venir les aider, ou encore des problèmes logistiques dus aux fortes pluies. À la ferme, les week-ends et les vacances n’existent pas vraiment mais la famille peut être amenée à partir à l’étranger pour les compétitions de Border Collies (dernièrement en Irlande du Nord pour les championnats du monde). Un bol d’air frais dans cette vie à cent à l’heure où chacun cumule les tâches du quotidien, la vie de l’exploitation, ses propres passions, l’administratif…
Cette réalité, avec des jours plus difficiles que d’autres, Jean-Rémi et Laure tentent de la transmettre à leur fille qui est en études pour devenir agricultrice. Ils essaient de lui parler des contraintes du métier, de la vie dans ce petit village au bout du Diois, mais ils tentent aussi de lui inculquer la réalité du modèle économique : « On vient d’investir pour elle en construisant deux bâtiments dont les toitures sont couvertes de panneaux photovoltaïques ». En misant sur la future génération, ils pérennisent le fruit de leur travail tout en insistant sur la nécessité pour leur fille d’allier dans sa future ferme une certaine rentabilité et sa passion du cheval.

Inquiétudes face au changement climatique, au loup…

Cette année, le couple d’éleveurs a réduit son cheptel de bovins de moitié à cause de la sécheresse. Sur l’alpage où ils font paître leurs bêtes, Jean-Rémi a constaté qu’à la fin de la saison il n’y avait plus d’eau. C’est la première fois mais le problème pourrait bien se reproduire avec le changement climatique. Plusieurs réflexions au niveau départemental sont d’ailleurs en cours pour trouver des solutions à la problématique de l’abreuvement en alpage.
La prédation lupine s’ajoute à leurs problèmes. Elle a particulièrement impacté le Gaec au début de son activité : « Les quelques brebis qui nous restaient étaient stressées et avortaient, donc on a connu des années sans revenu », souligne Jean-Rémi. Dans ce secteur du Haut-Diois, les attaques sont toujours présentes malgré le prélèvement de deux loups fin 2023. Le couple va prendre un nouveau chien de protection pour sécuriser son cheptel de bovins : « L’an dernier nous avons perdu deux bêtes en alpage ». Pour l’agriculteur, cette situation risque de se répéter.

Elodie Potente