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Vin

Crozes-Hermitage : « Placer le curseur qualitatif au plus haut »

Être plus fort sur l'export, accroître la notoriété de l'appellation, maintenir un haut niveau qualitatif et renforcer le budget, tels sont les principaux points de l'assemblée générale du syndicat des vignerons de l'AOP Crozes-Hermitage.

Par Christophe Ledoux
Crozes-Hermitage : « Placer le curseur qualitatif au plus haut »
©CL-AD26
« La concurrence est rude et imaginer que nos acquis sont des protecteurs immuables est une erreur », a prévenu Laurent Combier, président du syndicat des vignerons de l'AOP Crozes-Hermitage.

Avec 2 073 hectares dont 229 en blanc et 1 844 en rouge, « Crozes-Hermitage est un des crus les plus importants de la vallée du Rhône, a déclaré Laurent Combier, le 27 mars à Mercurol. Nos vins rayonnent en France et dans le monde et sont appréciés par un grand nombre de consommateurs, a-t-il ajouté en ouvrant l'assemblée générale de l'organisme de défense et de gestion (ODG) qu'il préside. Grâce au travail des vignerons, notre appellation est reconnue, observée et souvent enviée. » 

« Parmi les crus les plus avant-gardistes »

L'an dernier, le volume produit par les 275 déclarants de récolte a représenté 83 064 hectolitres (8 722 hl en blanc et 74 342 hl en rouge). « Cela devrait générer plus de dix millions de bouteilles et un chiffre d'affaires de plus de cent millions d'euros », a illustré Laurent Combier. Il a également mis l'accent sur « la constance des savoir-faire » et l'évolution qualitative de l'appellation qui ont conduit à certifier 60 % du vignoble de Crozes-Hermitage en HVE*, bio et biodynamie. « Cela nous place parmi les crus les plus avant-gardistes de la vallée du Rhône, a-t-il fait remarquer. Néanmoins, dans un climat tendu pour la filière viticole française, dans un monde en perpétuel changement, nous devons tous rester très vigilants et placer à chaque millésime le curseur qualitatif au plus haut. La concurrence est rude et imaginer que nos acquis sont des protecteurs immuables est une erreur. Nous n'avons pas d'autres chemins pour maintenir nos atouts que de continuer à travailler appliqué, de garder cette solidarité de cru et de faire des choix stricts selon les besoins du millésime », a-t-il prévenu en mettant l'accent sur « l'anticipation et la réactivité ».

Cotisation augmentée, droits de plantation diminués

L'an dernier, le volume produit par les 275 déclarants de récolte de Crozes-Hermitage a représenté 83 064 hectolitres. ©CL-AD26

Avec une année climatique 2024 « la plus arrosée de la décennie », Laurent Combier a salué le travail des vignerons pour maintenir le vignoble en bon état sanitaire. « Dès les premiers jus, ce millésime 2024 faisait sentir son énergie. Les vinifications se sont très bien déroulées et aujourd'hui les vins présentent un ensemble qualitatif de premier ordre », a-t-il constaté.

Parmi les chantiers lancés l'an dernier, figure une proposition de majoration de la cotisation interne de 90 euros par hectare. « Cela est nécessaire pour maintenir au premier plan la visibilité du Crozes-Hermitage dans le monde, nécessaire pour asseoir l'équilibre de nos finances et continuer à donner toute sa dimension à notre cru pour les années qui viennent », a justifié le président de l'appellation. Mise au vote, la proposition a été approuvée, ce qui porte la cotisation annuelle à l'ODG à 180 euros par hectare.

Par ailleurs, en matière de contingents de droits de plantation, « dès 2024, nous avons ralenti notre demande à 35 hectares », a signalé Laurent Combier. En cause, « l'incertitude économique » et une « filière vin chahutée ». Une décision rendue « nécessaire pour garder stabilité et équilibre dans les années à venir », a expliqué le président de l'appellation Crozes-Hermitage.

Renforcer l'approche technique

L'année 2024 a mis en évidence l'importance de la maîtrise du vignoble. Dans ce but, une rencontre avec les partenaires techniques de l'appellation Crozes-Hermitage a été réalisée afin d'établir un état des lieux des recherches et expérimentations en cours. « L'objectif est d'identifier ce qui peut être intéressant pour notre appellation », a-t-il été expliqué. Un questionnaire a aussi été envoyé à chaque vigneron pour connaître ses besoins techniques spécifiques.

Par ailleurs, des sondes tensiométriques et capacitives ont été installées l'an dernier sur des parcelles représentatives de l'appellation. Créé avec l'aide de Cooptain et de la chambre d'agriculture, ce « réseau stress hydrique » permettra de connaître en temps réel la situation du vignoble. D'autres travaux ont été engagés pour présenter les moyens de protection contre les aléas climatiques, améliorer le contenu des bulletins Zoom, conforter le réseau maturité…

Les actions de communication et de promotion ont été détaillées. Yann Chave, trésorier de l'ODG, a fait part du succès de l'opération organisée à New-York. Les prochaines cibleront le Canada et la Belgique. En France, la façade atlantique sera privilégiée après une première opération « Cep & Mer » réussie à La Rochelle.

Pour terminer, Laurent Combier a évoqué le succès du Grand week-end du Crozes-Hermitage. La troisième édition se déroulera du 25 au 27 avril à Mercurol pour le marché aux vins, sans oublier les soirées organisées par les vignerons.

Christophe Ledoux

* HVE : haute valeur environnementale.

Bilan de campagne 2023-2024 : « En demi-teinte mais plutôt positif »

« Dans un contexte compliqué pour les vins, le bilan de l'appellation Crozes-Hermitage en 2023-2024 est en demi-teinte mais plutôt positif avec un ratio de stock qui s'améliore et va continuer à s'améliorer », a résumé Sébastien Lacroix, responsable du service économique à Inter Rhône.

D'une campagne à l'autre, les sorties de chais (75 422 hl) ont progressé de 2 %, avec un recul de 8 % sur le conditionné (38 513 hl), une hausse de + 20 % des sorties vrac (18 580 hl) et de + 9 % des vendanges fraîches (18 196 hl).

Les cours ont progressé de 2 % à 646,60 €/hl (millésime courant, tous labels). Et les stocks de fin de campagne évoluent de + 10 % (62 420 hl). 

À noter, sur douze mois à fin juillet, les ventes en grandes distribution (GMS) reculent de 6 % (15 277 hl). Sur ce circuit de distribution, l'AOP Crozes-Hermitage reste leader parmi les crus.

À l'export, l'ensemble des crus septentrionaux est en fort recul sur un an, notamment vers le Japon, la Belgique, l'Allemagne et la Chine. Vers les États-Unis, le Royaume-Uni et la Suisse, les ventes sont stables.

Avec les turbulences mondiales, « il faut continuer à tenir la qualité et un prix qui correspond au marché » a souligné Laurent Combier, président du syndicat des vignerons de l'AOP Crozes-Hermitage.

C.L.

Projet Unesco : possible dépôt de candidature en 2026

Depuis 2021, les huit appellations viticoles de Vienne à Valence agissent pour faire classer le berceau d’origine de la syrah, devenu le septième cépage mondial le plus planté dans le monde, au patrimoine mondial de l’Unesco. Le projet s'inscrit désormais sur un vaste territoire autour du « paysage culturel, fluvial et viti-vinicole » du nord de la vallée du Rhône, qui regroupe 5 départements, 51 communes, 8 AOP et plus de 1 000 producteurs.

Pour porter le projet, une association a été créée le 25 mars dernier et le 7 mai une réunion « fondatrice » sera organisée sous l'égide de la Région en vue de déposer officiellement une candidature début 2026. La procédure, lourde et complexe, nécessite dix à quinze ans d'études.

À noter, onze vignobles sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco dont trois sont en France : juridiction de Saint-Émilion ; coteaux, maisons et caves de Champagne ; climats du vignoble de Bourgogne.

C.L.